Depuis ce mercredi 15 juillet, une publication partagée sur les réseaux sociaux a affirmé que certains des bureaux de l’office local de la Société congolaise de postes et télécommunications (SCPT) ont été transformés en maison de tolérance et qu’une autre partie de ses enceintes a été vendu à un particulier qui y a érigé un garage. C’est faux.

 «Une partie du bureau de la poste à Butembo est devenue une buvette et une autre une maison de tolérance ! La cour de cet office de poste et télécommunication serait vendu à un garagiste. A suivre ! Sé Tsongo Léon, la sentinelle de Butembo», peut-on lire sur le compte Facebook de Tsongo Léon, un activiste pro-démocratie et militant du parti politique UNC. Sa publication a généré plusieurs dizaines d’impressions dont 25 commentaires.

Cette alerte de l’un des meilleurs perdants aux législatives provinciales de mars 2019 en ville de Butembo a agité certains internautes et a été partagée dans plusieurs groupes whatsapp.  

La publication a suscité des réactions de la part des citoyens dont certains ont sans hésité, dénoncer la spoliation d’un bien de l’Etat à Butembo. 

La nouvelle a également été partagée par le média en ligne congolais ACTU7.CD dans un article lu 461 fois sur sa page web en deux jours et partagé sur sa page Facebook avec plus de 4660 abonnés. L’article n’a fait que relayer l’alerte de l’activiste Tsongo Léon. 

Lors d’un entretien téléphonique avec Congo Check, l’activiste Leon Tsongo confirme ses affirmations et ajoutent que ces enquêtes y ont découvert un bordel de prostitution. «Mon cher, c’est vrai, à la poste il y a une maison de tolérance. Et avec nos enquêtes, nous y avons découvert l’existence des lits!», affirme-t-il.

Une fausse alerte

Congo check s’est rendu sur le lieu dans le cadre de ses vérifications. Sur place, le constat est que l’image de la bâtisse illustrant les publications est bel et bien celle abritant les bureaux de la poste, une société paraétatique chargée des services postaux, notamment l’expédition et la réception des courriers. Cette bâtisse vielle de l’époque coloniale est érigée sur la Rue président de la République, en cellule MGL, au quartier Congo ya sika, devant la Direction générale de migration (DGM).

En se pointant dans les enceintes de la poste, un gros hangar retient l’œil. En approchant, on aperçoit des machines et leviers, et on constate qu’il accueille des véhicules suspendus et disposés comme ceux destinés à l’entretien. Il s’agit plutôt d’un centre de contrôle technique des véhicules.

Ce centre, premier du genre à Butembo, est détenu par «Erest», structure d’un particulier qui offre ses services à l’Etat congolais, en vue de faciliter le contrôle technique des véhicules. Dans la cours de la poste, le centre y est opérationnel depuis novembre 2019. Et au-delà de l’atelier de contrôle technique des véhicules, le hangar accueille également quatre offices, dont celui d’Erest et ceux de trois autres services étatiques impliqués dans le contrôle, notamment celui de transport et voies de communication (qui délivre le certificat de contrôle technique), celui de la Direction générale des recettes du  Nord-Kivu (DGR-NK, qui délivre les vignettes), ainsi que celui de la voirie de la mairie de Butembo. Et à côté de ces services, fonctionne également celui de lavage de véhicules.

Tranquille Binahwa, chef de centre Erest Butembo, précise qu’il ne s’agit pas d’un garage. «Il s’agit d’un centre de contrôle technique des véhicules. Nous Erest, l’Etat nous a attachés en tant que des experts pour effectuer le checking des véhicules. Et l’objectif de ce contrôle, c’est pour lutter contre les cas d’accidents», explique-t-il à CongoCheck. L’interlocuteur dément avoir acheté cette portion de terrain où est érigé le hangar. «Cet espace appartient à la poste. Nous Erest nous sommes des locataires de la SCPT», précise-t-il.

Au cours de notre enquête  à la poste ce jeudi, nous avons rencontrés quatre agents à qui nous avons expliqué le motif de notre arrivée. Surpris, ils nous soufflent qu’ils viennent à peine d’être appelés par un responsable à la mairie pour porter à leur connaissance cette alerte diffusée dans les réseaux sociaux.

«Mais jusqu’à votre arrivée, nous doutions de la gravité des faits, parce que c’est anormal qu’à cet âge de sagesse, nous puissions accepter de transformer l’un de nos bureaux, situés en quelques mètres de l’ANR, en buvette ou maison de tolérance», rétorque l’un de ces agents.  Tembos Mughambuli Faustin un autre agent accepte de nous ouvrir les portes de bureau et nous invite à découvrir tous les services opérationnels dans les enceintes de la poste. Notre premier constat, à côté de la porte d’entrée de l’administration fonctionne un restaurant dénommé «Vision lointaine».

Opérationnel depuis près de deux semaines, ce service est ténu par un ancien restaurateur des employés de la poste et ceux d’autres services fonctionnels dans les enceintes de celle-ci. Ce restaurant fournit des mets de la cuisine africaine et moderne, ainsi que de la boisson à ses clients.

Image du restaurant fonctionnant dans les locaux de la poste

 «C’est nous les premiers bénéficiaires de ces services. Pendant le service, il nous arrive d’avoir besoin à manger, et c’est là qu’on s’approvisionne», nous explique le comptable Tembos Mughambuli Faustin. «Au-delà de nous qui sommes employés dans les services opérationnels ici, il y a aussi nos clients, notamment ceux qui sont obligés de passer des longues heures pour le contrôle techniques de leurs véhicules qui s’approvisionnent aussi là-bas. C’était un besoin ressenti ici. C’est pour cela que nous avons encouragé celui qui nous fournissait à manger à nous ouvrir un restaurant ici», appuie le chef de centre d’Erest.

Derrière la bâtisse, du côté ouest vient d’être érigé un petit enclos en tôles ondulés. «Peut-être les gens pensent que c’est ici où est opérationnel le bordel de prostitution, puisque le petit enclos semble cacher derrière la bâtisse», s’exclame le comptable, sur fonds de moquerie. La porte nous est ouverte. Et le constat de Congo check, il s’agit de la cuisine du restaurant «Vision lointaine». A l’intérieur on y aperçoit sur l’étagère, des ustensiles, des épices ainsi que des casseroles d’aliments.

 

Cuisine du restaurant fonctionnant dans les locaux de la poste

Dans les chambrettes franchies pendant notre visite, Congo check n’y a aperçoit aucun lit. Juste des salles, certaines inhabitées, d’autres encore contenant des archives de courriers. «Nous assurons encore l’expédition et la réception des courriers. La poste fonctionne encore», nous explique le comptable, nous montrant des timbres qu’ils délivrent aux clients qui viennent déposer leurs courriers. Pour conclure, Tembos Mughambuli Faustin explique que les revenues issues de ces contrats de bail aident son service à répondre à certains besoins, dont l’entretien de la vielle bâtisse.

«Nombreux n’exploitent plus comme avant les services de la poste. Nous n’avons donc pas assez de rentrée. Si nous n’exploitons pas certaines opportunités (espace et bureau), nous ne saurons donc pas assurer l’entretien de notre office. Erest et le restaurant nous aide à répondre l’intérieur de nos bureaux. Allez ailleurs pays, c’est comme ça que la poste fait pour s’en sortir pour certains besoins», se justifie-t-il.

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